Jean-Jacques ROUSSEAU
--> Le Ranz des vaches
J-J.ROUSSEAU à la vielle
Pour le lecteur du Dictionnaire de la musique de Jean Jacques Rousseau, il est bien étrange de trouver une entrée particulière nommée Ranz des vaches. L'article est très court, sans intérêt particulier. Mais Rousseau éprouve le besoin de joindre "l'Air noté" de cette mélodie aux quelques autres qu'il transcrit dans son ouvrage. De plus, il consacre à ce même air un paragraphe conséquent dans son important article Musique, dévoilant alors un point de vue sur l'esthétique du plus haut intérêt. Ecoutons Rousseau : Cet air est "si chéri des Suisses qu'il fut défendu sous peine de mort de le jouer dans leurs Troupes, parce qu'il faisait fondre en larmes, déserter ou mourir ceux qui l'entendaient, tant il excitait en eux l'ardent désir de revoir leur pays". Voilà donc une mélodie bien puissante sur le plan émotionnel. [...] Ce que Rousseau pressent ici, dans une intuition très moderne, c'est qu'un événement (sonore) actuel puisse réactiver, sous la forme d'un affect puissant, un autre événement ou une situation enfouie dans le passé, refoulée ou réprimée. Cela pourrait bien produire ce sentiment d'"inquiétante étrangeté", mis en évidence par Freud, qui s'empare d'un sujet "lorsqu'un événement, une situation, un objet du monde extérieur, vient massivement re-mobiliser les traces du passé enfoui". Nous avons ailleurs évoqué cette question lorsque nous avons parlé de la rencontre de Freud et de GustaveMahler. Lorsque ce musicien entendait sonner, dans la rue, une hurdy-gurdy (probablement une Vielle A Roue), il était envahi par un affect d'angoisse, la situation actuelle agissant comme "signe mémoratif" d'une situation traumatique que Mahler avait vécue dans son enfance (une scène de ménage particulièrement violente entre ses parents).
Extrait de http://perso.wanadoo.fr/paul.fustier/d%E9part_general/non_vielle/Le%20Rans%20des%20vaches.htm
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Publié en 1767, le DICTIONNAIRE DE MUSIQUE reprend, corrige et complète les articles écrits par Rousseau pour l'Encyclopédie. : l'élaboration de cet ouvrage occupa donc Rousseau pendant seize années. L'ensemble constitue un tableau très utile de l'état de la musique théorique dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Il faut noter que Rousseau, s'il ne lève pas les critiques adressées au système de Rameau, n'en adopte pas moins les principes de l'auteur de la Génération harmonique, parce qu'ils sont désormais passés dans l'usage : « J'ai traité la partie harmonique dans le système de la basse fondamentale, quoique ce système, imparfait et défectueux à tant d'égards, ne soit point, selon moi, celui de la nature et de la vérité ».
Ecrit par zimzim,
le Jeudi 15 Janvier 2004, 16:45
dans la rubrique "Docs".
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